Humeur d’un vieux mûrier en mai
Bonjour, c’est moi le mûrier
Une fois n’est pas coutume
Je me suis récemment promené
Dans la forêt de Saou
Et j’ai fait une petite halte
Au bord de la Vèbre
La rivière qui traverse le synclinal
Et je vous partage mes pensées
De ce moment au bord de l’eau:
Au bord de la rivière
On ne fait pas la guerre
Inondé de lumière
De chocs liquides
Mouillés de soleil
On trempe dans un bonheur
Humide et claquant
On sent la plénitude
Tranquille et fluide
Qui nous enveloppe
De sa peau d’argent
Au bord de la rivière
On ne pense pas à la guerre
On se recouvre de nature
Baignée d’air pur
Nageant entre les sens
Se laissant emporter
Par un flot de pensées
Paisibles et insouciantes
Le regard se promène
Entre les cailloux
Et les reflets scintillants
Au bord de la rivière
Il n’y a pas la guerre
L’oreille capte les murmures
Ou les rugissements de l’onde
Embarqué par l’opéra
De la vie de l’eau
Hypnotisé par l’explosion
Des milliers de gouttelettes
Absorbé par les sillons
Et les siphons
Les changements de direction
Et les claquements de roche
On rêve de poésie
D’étincelles de rimes
Et de guirlandes de mots
Doux et frais
Au bord de la rivière
On est pacifiste
On n’a pas envie d’agresser son voisin
Pas envie d’être conquérant ou puissant
Pas envie d’écraser
Qui que ce soit
Juste envie de se fondre
Dans ce grand cycle
Auquel on appartient
Vous les humains et nous les arbres
Depuis la nuit des temps.